Surprenantes, incontrôlables, spectaculaires, les Révolutions et révoltes arabes ont secoué jusqu’à la France, déjà historiquement liée aux pays concernés. Elles ont été l’occasion de vérifier la capacité de la diplomatie française à se saisir des soubresauts de l’Histoire : prise de court en Tunisie, en retrait puis en soutien en Égypte, au front direct en Libye ou en Syrie... Signe d’un changement d’ère, cette diplomatie peut se trouver concurrencée par une diplomatie privée
, celle d’organisations non gouvernementales, peut-être plus au fait du terrain. Elle a aussi rendu plus visible et questionnable une diplomatie des contrats
contre-productive avec les partenaires saoudiens, israéliens ou émiratis, qui a semble-t-il fait du Quai d’Orsay l’antichambre de Bercy.
Ehko proposera une analyse transversale, avec un focus sur plusieurs pays. En Libye, l’initiative du Centre pour le dialogue humanitaire à Genève (HD Centre), spécialisé dans la médiation des conflits, illustre cette mutation de la diplomatie. L’ONU et son émissaire spécial ont mandaté ses représentants, qui ont mené 77 réunions publiques à travers tout le pays et auprès de la diaspora. Le but : recueillir la parole de plus de 7000 libyens qui y ont participé ou se sont manifestés sur la plateforme dédiée en ligne, par mail et sur les réseaux sociaux. Un rapport, The Libyan National Conference Process Final Report
, est né de cette initiative inédite, qui a été remise à l’ONU. Les auteurs Patrick Haimzadeh et Omeyya Naoufel Seddik le présenteront.
Au Yémen, une guerre voulue et menée par l’Arabie saoudite, accompagnée initialement par une dizaine de pays dont les Emirats Arabes Unis, fait rage depuis mars 2015. L’utilisation d’armements français est pointée, notamment par des ONG et des parlementaires. La consultante spécialisée sur les crimes de guerre et les ventes d’armes Hélène Legeay viendra parler de la diplomatie des contrats
appliquée par la France, qui fait passer certaines transactions – notamment la vente d’armes – avant le respect du droit. C’est ce que la première étude juridique du genre diligentée par l’ACAT (Action des chrétiens pour l'abolition de la torture) et Amnesty International rendue publique en mars 2018 interrogeait. Mais ce principe ne s’applique pas qu’au Yémen : cela se vérifie aussi avec Israël à Gaza, l’Egypte et d’autres pays. Se dirige-t-on vers des poursuites visant des entreprises et l’État français pour complicité de crime de guerre
et des condamnations ?